Rare barre de foyer « aux sphinges » en bronze très finement ciselé ou moleté, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat
Attribuée au maître bronzier Pierre-Philippe Thomire
Paris, époque Empire, vers 1805-1810
Entièrement réalisée en bronze très finement ciselé ou moleté, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat, cette barre de foyer se distingue par son décor néoclassique égyptisant. Elle s’organise autour de deux pilastres latéraux en ressaut supportant de superbes figures représentant des sphinges allongées coiffées de némès aux queues recourbées et aux ailes relevées ; les faces sont à décor de brandons ailés enrubannés rythmés de foudres dans des encadrements à frises de feuilles d’eau. La galerie longitudinale qui réunit les deux éléments est agrémentée de motifs en applique à jeux de rinceaux à fleurons et rosaces autour desquels s’enroulent des serpents supportant deux cygnes affrontés s’abreuvant à une fontaine soulignée d’une guirlande dans le bas et ornée d’une couronne, ainsi que d’un trident et d’une palme entrecroisés.
L’importance du chauffage dans la vie quotidienne des Parisiens sous l’Ancien Régime et sous l’Empire provoqua la création d’éléments en bronze que nous nommons « chenets » appelés au XVIIIe siècle des « feux en deux parties », car en paire, dont les fers recevaient les bûches nécessaires au chauffage. C’est véritablement vers la fin du XVIIIe siècle ou les toutes premières années du siècle suivant qu’apparaissent les barres de foyer, dites « garde-cendres », éléments complémentaires aux chenets. La rare barre de foyer que nous proposons fut réalisée dans ce contexte particulier, elle présente un décor égyptisant à sphinges allongées que l’on retrouve sur quelques rares autres modèles réalisés dans le même esprit et qui sont souvent rattachés à l’œuvre de Pierre-Philippe Thomire, le plus talentueux bronzier de son époque, citons notamment : un premier exemplaire photographié dans le foyer d’une cheminée de l’un des salons de l’Hôtel de la Marine à Paris (illustré dans P. Verlet, Les bronzes dorés français du XVIIIe siècle, Editions Picard, Paris, 1999, p.311, fig.343) ; ainsi qu’un deuxième, anciennement sur le Marché de l’Art parisien, qui est reproduit dans H. Ottomeyer et P. Pröschel, Vergoldete Bronzen, Die Bronzearbeiten des Spätbarock und Klassizismus, Tome I, Munich, 1986, p.341, fig.5.4.6 ; et un troisième qui est exposé au Musée de Malmaison, ancienne résidence de l’Impératrice Joséphine (Inv. M.M.40.47.355). Enfin, relevons qu’une barre de foyer présentant une galerie agrémentée d’un décor identique à cygnes s’abreuvant à une fontaine fait partie des collections du Mobilier national à Paris (parue dans M-F. Dupuy-Baylet, De Bronze et de Cristal, Objets d’ameublement XVIIIe-XIXe siècles du Mobilier national, Dijon, 2020, p.216-217, catalogue n°96).
Pierre-Philippe Thomire (1757 - 1843)
Pierre-Philippe Thomire est le plus important bronzier parisien du dernier quart du XVIIIe siècle et des premières décennies du siècle suivant. À ses débuts, il travaille pour Pierre Gouthière, ciseleur-fondeur du roi, puis collabore dès le milieu des années 1770 avec Louis Prieur. Il devient ensuite l’un des bronziers attitrés de la manufacture royale de Sèvres, travaillant au décor de bronze de la plupart des grandes créations du temps. Après la Révolution, il rachète le fonds de commerce de Martin-Eloi Lignereux et devient le plus grand pourvoyeur de bronzes d’ameublement pour les châteaux et palais impériaux. Parallèlement, il travaille pour une riche clientèle privée française et étrangère parmi laquelle figure notamment quelques maréchaux de Napoléon. Enfin, il se retire des affaires en 1823.