Exceptionnel cartel d’applique dit « aux chérubins » en bronze finement ciselé et doré
« Fille Prevost à Angers »
Dans une caisse attribuée à Pierre Gouthière
Paris, époque Louis XVI, vers 1785
Provenance :
Collection Manolo March, Mallorque.
Le cadran émaillé, signé Fille Prevost à Angers, indique les heures en chiffres romains, les minutes en chiffres arabes, les jours du mois et les jours de la semaine ; il est inscrit dans une superbe caisse originale entièrement réalisée en bronze doré et d’une qualité de ciselure exceptionnelle. La lunette est soulignée d’une frise d’entrelacs et l’amortissement est formé d’une urne tripode ciselée de cannelures à asperges, ornée de têtes de bélier et sommée d’un bouquet de fleurs et de fruits. Le tout repose sur une partie inférieure architecturée dont l’entablement est à décor de frises de feuilles de persil et d’oves et raies de cœur alternées ; la partie centrale est décorée d’une frise rectangulaire en bas-relief bordée d’enfilage de perles figurant des amours musiciens dans des nuées ; de part et d’autre est attachée une élégante guirlande de feuilles de chêne et de glands attachée à un anneau. Enfin, deux belles figures d’enfants en ronde-bosse légèrement drapées flanquent le cadran.
Sa qualité de ciselure et de dorure et la rareté de sa composition, puisque à ce jour il est le seul exemplaire de ce modèle à être répertorié, nous permettent de l’attribuer à l’un des meilleurs ciseleurs-doreurs parisiens du dernier tiers du XVIIIe siècle : Pierre Gouthière. Aucun exemplaire comparatif de Gouthière ne peut être véritablement mis en parallèle, mais soulignons que certains bronzes d’ameublement de cet artisan virtuose offrent de nombreuses similitudes stylistiques (voir notamment H. Ottomeyer et P. Pröschel, Vergoldete Bronzen, Band I, Munich, 1986, p. 208, planche XXV).
À notre connaissance, il existe deux autres modèles particulièrement proches, mais conçus avec des variantes, particulièrement par l’absence des chérubins latéraux : le premier est passé en vente sur le marché de l’art américain en 1987 (vente Sotheby’s, New York, le 16 mai 1987, lot 27) ; le second, signé Lepaute à Paris, a été vendu il y a une vingtaine d’années à Monaco lors de la dispersion d’une partie des collections du célèbre couturier Hubert de Givenchy.
Pierre Gouthière (1732 - 1813)
Pierre Gouthière est certainement le plus talentueux ciseleur parisien de son temps. Patronné par le duc d’Aumont, l’un des plus grands collectionneurs de la seconde moitié du XVIIIe siècle, Gouthière obtient en 1767 son brevet de « doreur ordinaire des Menus Plaisirs du Roi », administration royale qui gérait notamment les commandes privées passées par le souverain aux artistes et aux artisans. Cette nomination lui permet d’acquérir une extraordinaire notoriété et de se composer la plus belle clientèle de l’époque uniquement composée d’amateurs d’objets rares et précieux, parmi laquelle figuraient, outre la famille royale et le duc d’Aumont, de grands aristocrates tels que le marquis de Marigny, frère de la marquise de Pompadour, la princesse Kinsky, la comtesse Du Barry, maîtresse du Roi, la duchesse de Mazarin, le duc de Duras, la duchesse de Villeroy…ainsi que de grands financiers, particulièrement Baudard de Saint-James, richissime trésorier général de la marine, et le puissant banquier Thélusson.