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Rémond  -  Daguerre

Importante paire de candélabres à cinq lumières en marbre rouge griotte et bronze finement ciselé, patiné « à l’antique » ou doré à l’or mat et à l’or bruni

Candelabres_009-05

Attribuée à François Rémond

Et probablement réalisée sous la direction de Dominique Daguerre

Paris, fin de l’époque Louis XVI, vers 1785-1790

Hauteur115 Largeur38.5

Chaque candélabre présente un fût formé d’une superbe figure féminine en bronze patiné « à l’antique », les cheveux coiffés en chignon et drapée dans une longue robe aux plissés qui laissent entrevoir les formes sensuelles de la jeune nymphe ; elle supporte un bouquet à cinq lumières émergeant d’une corne d’abondance à feuillages, cannelures torses et enfilage de perles ; les bras « en arabesques » sont soulignés de feuilles d’acanthe et de tiges à graines et rosaces, celui de face se termine en terme d’enfant ailé. Les bras supportent des bassins, binets et bobèches, très finement ciselés de frises perlées, feuillages ou bandeaux à canaux ; au centre de chaque bouquet, est une tige en forme de torche enflammée. L’ensemble est supporté par une plinthe tronconique en marbre rouge griotte d’Italie soulignée d’enfilage de perles ou tore moleté, elle-même reposant sur une base quadrangulaire à réserves brunies se détachant dans des encadrements à l’or mat.

La composition originale de cette rare paire de candélabres s’inspire plus ou moins directement de l’œuvre du sculpteur Etienne-Maurice Falconet (1716-1791), notamment d’un modèle qui fut esquissé en marge du livret du Salon de 1761 par Saint-Aubin (voir H. Ottomeyer et P. Pröschel, Vergoldete Bronzen, Band I, Munich, 1986, p.254, fig.4.7.1) ; ainsi que d’un modèle de torchère exécuté par le sculpteur pour le château de Versailles (reproduit dans Le Dix-huitième siècle français, Collection Connaissance des Arts, Paris, 1956, p.150). Leur qualité de ciselure et de dorure nous permet de les attribuer à l’œuvre de l’un des plus importants artisans parisiens de l’époque : François Rémond, qui travaillait essentiellement à cette époque pour Dominique Daguerre, le plus important marchand-mercier du temps.

Parmi les candélabres répertoriés présentant des figures féminines identiques, citons particulièrement : une première paire conservée à la Wallace Collection à Londres attribuée à François Rémond par Christian Baulez (voir « Les bronziers Gouthière, Thomire et Rémond », dans Versailles, deux siècles d’histoire de l’art, Etudes et chroniques de Christian Baulez, 2007, p.416) ; ainsi qu’une seconde paire qui est exposée dans la Bibliothèque de Louis XVI au Musée national du Château de Versailles (illustrée dans M. et Y. Gay, « Horlogerie royale au Château de Versailles », dans Bulletin de l’Association nationale des collectionneurs et amateurs d’Horlogerie ancienne et d’Art, printemps 1997, n°78, p.19).

François Rémond (vers 1747 - 1812)

À l’instar de Pierre Gouthière, François Rémond est l’un des plus importants artisans ciseleurs-doreurs parisiens du dernier tiers du XVIIIe siècle. Il débute son apprentissage en 1763 et obtient ses lettres de maîtrise en 1774. Immédiatement son talent lui permet de se composer une riche clientèle parmi laquelle figuraient notamment certaines personnalités de la Cour. Mais surtout François Rémond, par l’intermédiaire du marchand-mercier Dominique Daguerre, participe à l’ameublement de la plupart des grands collectionneurs de la fin du XVIIIe siècle en fournissant des caisses de pendules, des chenets, des candélabres…toujours d’une très grande qualité d’exécution et aux compositions particulièrement raffinées et novatrices qui firent sa notoriété.



Dominique Daguerre

Dominique Daguerre est le plus important marchand-mercier, comprenez marchand d’objets de luxe, du dernier quart du XVIIIe siècle. Ses débuts de carrière restent relativement méconnus et l’on peut considérer qu’il démarre véritablement son activité à partir de 1772, année de son association avec Philippe-Simon Poirier (1720-1785), autre marchand-mercier célèbre et inventeur des pièces d’ébénisterie agrémentées de plaques de porcelaine de la Manufacture royale de Sèvres. Lorsque Poirier se retire des affaires, vers 1777-1778, Daguerre prend la direction du magasin rue du Faubourg Saint-Honoré et garde la raison sociale « La Couronne d’Or ». Conservant la clientèle de son prédécesseur, il développe considérablement l’activité en quelques années et joue un rôle de premier plan dans le renouveau des arts décoratifs parisiens de l’époque en faisant travailler les meilleurs ébénistes du temps, particulièrement Adam Weisweiler, Martin Carlin et Claude-Charles Saunier, le menuisier du Garde-Meuble de la Couronne, Georges Jacob, les bronziers ou ciseleurs-doreurs Pierre-Philippe Thomire et François Rémond et les horlogers Renacle-Nicolas Sotiau et Robert Robin. Ayant porté le luxe « à la française » à son summum, Daguerre, visionnaire et homme d’affaires hors du commun, s’installe en Angleterre vers le début des années 1780 et s’associe avec Martin-Eloi Lignereux, qui reste en charge du magasin parisien. A Londres, patronné par le prince Régent, futur roi George IV, Daguerre participe activement à l’aménagement et à la décoration de Carlton House et du Pavillon de Brighton, en faisant fonctionner à merveille son réseau d’artisans parisiens important de Paris la plupart des meubles, sièges, cheminées, bronzes d’ameublement et objets d’art et facturant, uniquement pour l’année 1787, plus de 14500£ de fournitures. Impressionnés par le talent du marchand, quelques grands aristocrates anglais font également appel à ses services, particulièrement le Comte Spencer pour Althorp où Daguerre collabore avec l’architecte Henry Holland (1745-1806). A Paris, il continue, par l’intermédiaire de son associé Lignereux, à travailler pour les grands amateurs et livre de superbes pièces d’ébénisterie au Garde-Meuble de la Couronne. Probablement très affecté par les troubles révolutionnaires et la disparition de nombreux de ses clients les plus importants, il se retire définitivement des affaires en 1793.