Rare pendule de cheminée en bronze très finement ciselé, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat et à l’or bruni
« Erigone s’enivrant »

Attribuée à Pierre-Philippe Thomire
Paris, époque Empire, vers 1805-1810
Le cadran circulaire émaillé blanc, signé « à Paris », indique les heures en chiffres romains, les minutes par tranches de quinze en chiffres arabes, par deux aiguilles en bronze doré et repercées. Il est ceinturé d’une lunette à double frise de rameaux d’olivier ou grecques et est renfermé dans une caisse néoclassique entièrement réalisée en bronze ciselé et doré. Le mouvement s’inscrit au centre d’un entablement à motifs en applique à deux panthères affrontées dégustant des fruits dans des paniers, palmettes stylisées, draperies à franges, flûte de Pan ou « syrinx » et xylophone retenus par des rubans ; l’ensemble repose sur quatre pieds à masques bachiques et doubles jarrets caprins et supporte un matelas simulé, à frise alternée de palmettes et tigettes fleuries stylisées, sur lequel est allongée une superbe figure de bacchante légèrement drapée, un tambourin, un thyrse et deux aiguières à anses à têtes léonines sont posés à ses pieds. La jeune femme, figure allégorique d’Erigone, est appuyée sur un coussin adossé au dossier renversé du lit de repos agrémenté de rosaces, pampres et chèvre, et tient au-dessus de sa tête une grappe de raisin qu’elle porte à sa bouche. Enfin, l’horloge repose sur une base quadrangulaire en marbre vert de mer moulurée, ceinturée d’une double frise de grecques entrelacées, et posée sur quatre pieds « galets».
Le mythe des amours d’Erigone, fille de l’Athénien Icarios, et de Dionysos, dieu de la vigne et du vin, est l’un des plus célèbres de la mythologie classique grecque ; pour la séduire, le dieu prit la forme d’une grappe de raisin et enivra la jeune femme. Cette thématique a servi de prétexte à la création de l’horloge que nous présentons, dont l’exceptionnelle qualité de ciselure et de dorure, ainsi que l’originalité de la composition, nous permettent de l’attribuer à Pierre-Philippe Thomire, le plus talentueux bronzier parisien de l’époque Empire.
De nos jours, parmi les pendules réalisées dans le même esprit citons notamment un modèle avec variante dont un exemplaire fait partie de la célèbre collection des princes de Hesse au château de Fasanerie à Fulda (illustré dans le catalogue de l’exposition Gehäuse der Zeit, Uhren aus fünf Jahrhunderten im Besitz der Hessischen Hausstiftung, 2002, p.95, catalogue n°36) ; tandis qu’un second est conservé au Palais de Peterhof près de Saint-Pétersbourg (voir O. Swetlitschnaja, Russische und Französische Bronzen des Empire, Aus der Sammlung der Museen von Petrodvoretz, Postdam, 1990, p.27, catalogue n°13).
Enfin, mentionnons particulièrement deux pendules de dessin identique à celle que nous proposons : la première est reproduite dans P. Kjellberg, Encyclopédie de la pendule française du Moyen Age au XXe siècle, Paris, 1997, p.402 ; la seconde appartient aux collections du Musée du Louvre à Paris (parue dans H. Ottomeyer et P. Pröschel, Vergoldete Bronzen, Die Bronzearbeiten des Spätbarock und Klassizismus, Band I, Munich, 1986, p.379, fig.5.15.19).
Pierre-Philippe Thomire (1757 - 1843)
Pierre-Philippe Thomire est le plus important bronzier parisien du dernier quart du XVIIIe siècle et des premières décennies du siècle suivant. À ses débuts, il travaille pour Pierre Gouthière, ciseleur-fondeur du roi, puis collabore dès le milieu des années 1770 avec Louis Prieur. Il devient ensuite l’un des bronziers attitrés de la manufacture royale de Sèvres, travaillant au décor de bronze de la plupart des grandes créations du temps. Après la Révolution, il rachète le fonds de commerce de Martin-Eloi Lignereux et devient le plus grand pourvoyeur de bronzes d’ameublement pour les châteaux et palais impériaux. Parallèlement, il travaille pour une riche clientèle privée française et étrangère parmi laquelle figure notamment quelques maréchaux de Napoléon. Enfin, il se retire des affaires en 1823.