Rare pendule de cheminée en biscuit de porcelaine et bronze très finement ciselé, bretté et doré à l’or mat ou à l’or bruni
« Les deux Naïades »
« Schmit à Paris »
Manufacture Dihl et Guérhard dite « Manufacture du duc d’Angoulême »
Paris, fin de l’époque Louis XVI, vers 1790
Le cadran circulaire émaillé blanc, signé « Schmit à Paris », indique les heures et les minutes par tranches de quinze en chiffres arabes par deux aiguilles en cuivre repercé et doré. Il s’inscrit dans une caisse entièrement réalisée en biscuit de porcelaine à l’imitation du marbre blanc de Carrare, du biscuit dit « de Wedgwood » ou en camaïeu de gris sur fond jaune, et agrémentée de quelques ornements en bronze très finement ciselé, bretté et doré à l’or mat ou à l’or bruni à frises de feuilles d’eau et cadres à enfilages de perles et olives alternées. Le mouvement, à sonnerie des heures et des demi-heures, est renfermé dans une boite en borne architecturée, à plaque à fond bleu ornée d’un enfant allongé sur un dauphin, sur laquelle sont accoudées deux superbes figures allégoriques en pied représentant deux naïades drapées « à l’antique » tenant des urnes d’où s’écoulent des filets d’eau, symbole du passage du Temps. L’ensemble repose sur une base quadrangulaire, à décrochements et côtés arrondis, ornée de réserves en camaïeu de gris sur fond jaune à courses de rinceaux animées de paniers chargés de fruits, pampres, serpents et personnages ; le panneau de façade centré d’un cartouche inscrit « Manufre de MM Guerhard et Dihl a Paris ». Enfin, huit pieds à frises brettées supportent l’horloge.
Cette superbe pendule illustre l’exceptionnelle inventivité des horlogers parisiens de la seconde moitié du XVIIIe siècle qui parvinrent à créer des œuvres d’une originalité et d’une qualité sans égale en associant les matériaux les plus luxueux et les plus précieux. Elle fut réalisée par la célèbre Manufacture dite « du duc d’Angoulême » ; car patronnée dès 1781 par ce grand aristocrate qui confia par la suite la direction à deux groupes d’associés : Christophe Erasimus Dihl et les époux Guérhard, qui firent de cette entreprise la principale rivale de la Manufacture de Sèvres dans les dernières années du XVIIIe siècle et sous le règne de Napoléon. Dès la chute de la monarchie, la manufacture créa de nouveaux modèles, notamment des groupes ou figures non émaillés, particulièrement appréciés lorsque montés en « grandes pendules en beau biscuit » (Dictionnaire universel de la géographie commerçante, Tome V, p.325 ; cité dans R. de Plinval de Guillebon, Les biscuits de porcelaine de Paris XVIIIe-XIXe siècles, Editions Faton, Dijon, 2012, p.199).
Sa composition originale et parfaitement équilibrée rencontra un grand succès auprès des grands amateurs parisiens du temps ; ainsi parmi les rares modèles identiques répertoriés, présentant quelques variantes notamment dans le traitement du décor de la base et toutes signées de l’horloger Schmit, citons particulièrement : un premier exemplaire qui a été proposé aux enchères chez Christie’s à Londres le 14 mai 1970, lot 40 ; ainsi qu’un deuxième qui est illustré dans P. Heuer et K. Maurice, European Pendulum Clocks, Decorative Instruments of Measuring Time, Munich, 1988, p.59, fig.94 ; ; enfin, mentionnons une dernière pendule de ce modèle qui est conservée dans une collection particulière et reproduite dans R. de Plinval de Guillebon, op.cit., Editions Faton, Dijon, 2012, p.196.
Jean-Nicolas Schmit (? - vers 1820)
Jean-Nicolas Schmit figure parmi les plus importants horlogers parisiens de la fin du XVIIIe siècle et des premières décennies du siècle suivant. Après son accession à la maîtrise, en août 1781, il installe son atelier rue Betizy et connaît immédiatement une grande notoriété auprès des grands collectionneurs du temps. La perfection de ses mouvements attire notamment l’attention des deux directeurs de la Manufacture du duc d’Angoulême : Dihl et Guérhard, qui le font collaborer pour la réalisation de la quasi-totalité des mécanismes des pendules créées par leur entreprise. Enfin, relevons que certains documents anciens mentionnent des pendules de cet horloger chez les plus grands amateurs d’art de l’époque, citons notamment celles décrites au moment des inventaires après décès de Son Excellence Jean-Etienne-Marie de Portalis, conseiller d’état de Napoléon, et de l’épouse de Louis-Marie-Bretagne-Dominique de Rohan-Chabot, duc de Rohan et cousin du roi Louis XV.