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Baillon

Rare pendule d’alcôve dite « tête de poupée » en bronze très finement ciselé et doré à l’or mat ou à l’or bruni

Pendule389-02_HD_WEB

Paris, début de l’époque Louis XV, vers 1725

Hauteur28,5 cm Largeur12,5 cm Profondeur10,5

Le cadran circulaire émaillé blanc, signé « Jean-Baptiste Baillon », indique les heures en chiffres romains alternés de fleurs de lys or en applique et les minutes par tranches de cinq en chiffres arabes par deux aiguilles en cuivre ciselé, repercé et doré. Le mouvement, à sonnerie des heures et des demi-heures et à platine également signée, est renfermé dans une superbe caisse violonée entièrement réalisée en bronze très finement ciselé et doré à l’or mat ou à l’or bruni. L’amortissement se présente sous la forme d’une plaque cintrée ornée d’une pomme de pin stylisée émergeant d’une rosace turbinée dans une réserve à motifs lancéolés rayonnants centrés de fleurettes; le fronton est souligné d’une frise d’oves. La caisse présente sur l’ensemble de ses faces des réserves sinueuses délimitées par des filets renfermant des panneaux en croisillons centrés de quartefeuilles. Les côtes sont agrémentés de médaillons à bordure moulurée figurant des profils masculin et féminin en relief se détachant sur des fonds amatis flanqués de demi-coquilles stylisées. L’ensemble repose sur une base quadrangulaire ceinturée d’une frise alternée d’épis ou bandeaux à canaux ; enfin, quatre pieds raves moulurés supportent l’horloge.

La composition particulièrement originale de cette rare pendule d’alcôve, dite « tête de poupée », nous permet de l’intégrer au corpus des créations parisiennes d’horlogerie de luxe parmi les plus élaborées de son temps. L’originalité de son dessin, qui n’est pas sans rappeler certains dessins préparatoires de Daniel Marot, ainsi que la qualité exceptionnelle de sa ciselure et de sa dorure nous permettent de distinguer ce modèle et de relever particulièrement les proximités stylistiques qu’il présente avec l’œuvre d’André-Charles Boulle, probablement l’artisan le plus talentueux et le plus réputé de son époque. Enfin, relevons que parmi les rares pendules connues de modèle identique avec parfois certaines variantes dans la composition et le décor, nous pouvons citer particulièrement un exemplaire à sonnerie à la demande, le cadran signé « Etienne Lenoir à Paris », dont le recouvrement présente un anneau mobile de transport et qui est illustré dans G. et A. Wannenes, Les plus belles pendules françaises, De Louis XIV à l’Empire, Editions Polistampa, Florence, 2013, p.72.

Jean-Baptiste III Albert Baillon (? - 1772)

Cet excellent horloger, également un grand innovateur, est considéré par F.J. Britten comme étant « l’horloger le plus riche de l’Europe » à son époque. L’un des meilleurs horlogers de son temps, il appartient à l’une des plus importantes dynasties horlogères du XVIIIème siècle, étant sans doute le plus célèbre membre de la famille. Sa réussite est due, entre autres, à l’importante manufacture privée qu’il fonda à Saint-Germain-en-Laye, établissement unique dans l’histoire de l’horlogerie du XVIIIème siècle.

Dirigée de 1748 à 1757 par Jean Jodin (1715-61), elle continue de fonctionner jusqu’à ce que Baillon la ferme en 1765. Le célèbre horloger Ferdinand Berthoud fut impressionné par la quantité et la qualité de ses produits ; en 1753 il nota : « Sa maison est le plus bel et riche Magasin de l’Horlogerie. Les Diamant sert non seulement à décorer ses montres, mais même des Pendules ; Il en a fait dont les Boetes étoïent de petits Cartels d’Or, ornés de fleurs de Diamans imitant la Nature… Sa maison de St-Germain est une espèce de Manufacture. Elle est remplie d’Ouvriers continuellement occupés pour lui… puisque lui seul fait une bonne partie de l’Horlogerie ».

La clientèle de Baillon comprend les familles royales françaises et espagnoles et le Garde-Meuble de la Couronne, ainsi que des personnalités influentes à la cour et dans la bonne société parisienne.

Le père de Baillon, Jean-Baptiste II (m. 1757) est un maître horloger parisien ; son grand-père, Jean-Baptiste I de Rouen, était également un horloger. Son fils, Jean-Baptiste IV Baillon (1752 – vers 1773) devient aussi horloger. Baillon lui-même est fait maître-horloger en 1727. En 1738 il est nommé valet de chambre-horloger ordinaire de la reine, puis, avant 1748, premier valet de chambre de la reine, et en 1770, premier valet de chambre et valet de chambre-horloger ordinaire de la dauphine de Marie-Antoinette. Dès 1738 il s’établit Place Dauphine ; après 1751 on le trouve rue Dauphine.

Baillon était très exigeant quant à la qualité des boîtes et des cadrans. Ces derniers étaient fournis par Antoine-Nicolas Martinière et Chaillou ; les boîtes étaient de Jean-Baptiste Osmond, Balthazar Lieutaud, les Caffieri, Vandernasse, et Edmé Roy Jean-Joseph de Saint-Germain (qui a également fait des boîtes à l’éléphant et au rhinocéros).

Jean-Baptiste Baillon s’enrichit grâce à son succès ; à sa mort le 8 avril 1772, on estime sa fortune à 384,000 livres. Une première vente de sa collection d’art et d’objets d’art est tenue le 16 juin 1772 ; les objets restant, évalués à 55,970 livres, sont offerts à nouveau le 23 février 1773. La vente comprend 126 montres terminées pour un total de 31,174 livres, et 127 mouvements de montres terminés, à 8,732 livres. La catégorie des pendules, dont la valeur montait à 14,618 livres, comprend 86 pendules, 20 mouvements de pendules, sept boîtes de pendules en marqueterie, une boîte en porcelaine et huit en bronze.

Aujourd’hui l’œuvre de Baillon est conservée dans les collections les plus prestigieuses du monde, y compris les musées du Louvre, des Arts Décoratifs, le conservatoire national des arts et métiers, le Petit Palais et le musée Jacquemart-André à Paris ; le château de Versailles ; le musée Paul Dupuy à Toulouse ; la Residenz Bamberg ; le Neues Schloss, Bayreuth; le Museum für Kunsthandwerk, Frankfurt ; la Residenz à Munich et le château Schleissheim. D’autres exemples sont dans les collections des musées royaux d’art et d’histoire de Bruxelles ; le Patrimonio Nacional d’Espagne ; le Metropolitan Museum de New York ; le Newark Museum ; Walters Art Gallery de Baltimore et Dalmeny House, South Queensferry.