Rare groupe mythologique en bronze très finement ciselé à patine médaille figurant « Les Adieux d’Hector et d’Andromaque »

Attribué à Pierre-Philippe Thomire et réalisé d’après un biscuit de la Manufacture de Sèvres créé sous la direction de Louis-Simon Boizot
Paris, début du XIXe siècle, vers 1800-1810
Ce superbe groupe, composé de quatre figures, illustre l’un des épisodes les plus célèbres de la mythologie classique. Hector, prince de Troie, est représenté portant un casque à panache de plumes, vêtu d’une large draperie et cuirassé « à l’antique » ; il serre contre lui son épouse, Andromaque, coiffée d’un diadème qui le regarde avec amour et tristesse en tenant leur fils Astyanax dans ses bras ; ils sont figurés à côté d’un tronçon de colonne fracturée reposant sur un bloc de pierre simulée. A l’arrière, se trouve une jeune femme tenant le couffin de l’enfant, certainement la nourrice du bambin, mais possiblement aussi la représentation d’Hélène, devenue une proche d’Andromaque. Les personnages reposent sur une base circulaire à terrasse traitée « au naturel » et titrée : « Les Adieux d’Hector et Dandromaque ».
Le thème des Adieux d’Hector, fils du roi Priam et prince de Troie, à son épouse Andromaque, est l’une représentations privilégiées par les artistes et les artisans parisiens dès les dernières décennies du XVIIIe siècle. Tiré de l’Iliade, célèbre épopée du poète grec Homère, il illustre le moment où Hector, sur le point d’affronter Achille et certain de sa défaite, fait ses adieux aux êtres qui lui sont chers. Cette iconographie se retrouve notamment traitée de façon différente sur une pendule livrée en 1805 par les horlogers Lepaute pour être placée sur la cheminée du Grand Salon du Petit Trianon et conservée de nos jours dans les collections publiques françaises (reproduite dans M-F. Dupuy-Baylet, Pendules du Mobilier national 1800-1870, Editions Faton, Dijon, 2006, p.111, catalogue n°47).
Surtout, relevons que le groupe que nous proposons est fondu en bronze d’après une statuette en biscuit de Sèvres créée vers 1797-1798 sous la direction de Boizot et dont un exemplaire appartient aux collections du Musée du Louvre à Paris (parue dans T. Préaud et G. Scherf, La Manufacture des Lumières, La sculpture à Sèvres de Louis XV à la Révolution, Editions Faton, Dijon, 2015, p.270). Enfin, soulignons que l’exceptionnelle qualité de ciselure du groupe proposé nous permet de le rattacher à l’œuvre du talentueux bronzier Pierre-Philippe Thomire ; artisan qui collabora notamment avec Boizot sur un autre groupe en bronze qui est conservé au Metropolitan Museum of Art à New York (voir T. Picquenard, « Catalogue de l’œuvre sculptée de Louis-Simon Boizot », dans le catalogue de l’exposition Louis-Simon Boizot 1743-1809, Sculpteur du roi et directeur de l’atelier de sculpture à la Manufacture de Sèvres, Musée Lambinet, Versailles, 2001-2002, p.165-166).
Pierre-Philippe Thomire (1757 - 1843)
Pierre-Philippe Thomire est le plus important bronzier parisien du dernier quart du XVIIIe siècle et des premières décennies du siècle suivant. À ses débuts, il travaille pour Pierre Gouthière, ciseleur-fondeur du roi, puis collabore dès le milieu des années 1770 avec Louis Prieur. Il devient ensuite l’un des bronziers attitrés de la manufacture royale de Sèvres, travaillant au décor de bronze de la plupart des grandes créations du temps. Après la Révolution, il rachète le fonds de commerce de Martin-Eloi Lignereux et devient le plus grand pourvoyeur de bronzes d’ameublement pour les châteaux et palais impériaux. Parallèlement, il travaille pour une riche clientèle privée française et étrangère parmi laquelle figure notamment quelques maréchaux de Napoléon. Enfin, il se retire des affaires en 1823.
Louis-Simon Boizot (1743 - 1809)
Le fils d’Antoine Boizot, qui travailla à la Manufacture de Tapisseries des Gobelins , Boizot est formé dans l’atelier du sculpteur René-Michel Slodtz (1705–1764), qui forma également Houdon. Boizot épouse Marguerite Virginie Guibert, la fille du sculpteur Honoré Guibert. En 1778 il est admis à l’Académie royale de peinture et de sculpture and expose aux salons annuels jusqu’en 1800. Ses bustes de Louis XVI et de Joseph II, créées en 1777, sont produits en porcelaine à Sèvres.
De 1773 à 1800 Boizot dirige l’atelier de sculpture de la Manufacture de Sèvres, produisant une série de figures en biscuit de porcelaine, au fini mat ressemblant au marbre.
Boizot crée également des modèles en terre cuite pour des boîtes de pendules en bronze doré, comme celle de la pendule allégorique dite « d’Avignon », faite en 1777 par le bronzier Pierre Gouthière et aujourd’hui dans la Wallace Collection de Londres.