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Cronier  -  Dubuisson  -  Schwerdfeger

Exceptionnelle pendule dite « régulateur de bureau » à remontoir d’égalité, équation du temps et calendriers révolutionnaire et grégorien

Régulateur032-06_HD_WEB

Le cadran émaillé par Etienne Gobin, dit Dubuisson

Dans une caisse attribuée à l’ébéniste Ferdinand Schwerdfeger

Paris, époque Consulat, daté 1800

Hauteur52.5 cm Largeur31.5 cm Profondeur20.5 cm

Provenance :

-Collection Vitale, Christie’s, Londres, le 26 novembre 1996, lot 279.

 

Le cadran annulaire émaillé blanc, souligné sur sa bordure extérieure d’un bandeau bleu azur à décor alterné de motifs feuillagés à palmettes rehaussés de cabochons encadrant des figures en camaïeu représentant les signes de zodiaque, est daté « 1800 » et signé « Dubuisson », pour Etienne Gobin, l’un des plus célèbres émailleurs parisiens de son époque, confrère et principal concurrent de Joseph Coteau. Il indique les heures en chiffres romains, les graduations des minutes, les calendriers grégorien et républicain, ainsi que l’équation du temps, marquant la différence entre le temps vrai, solaire, et le temps moyen, terrestre ; il indique également les secondes par une trotteuse centrale ; l’ensemble par cinq aiguilles, dont deux en cuivre ciselé, doré et repercé en entrelacs. Le cadran est fixé sur une platine de façade dissimulée, signée « Cronier jeune/Elève de Robin » et offrant les deux trous de remontage encadrant l’indication « Remontez à gauche » ; la platine arrière est également signée « Cronier Jne à Paris 1800 ». Le mouvement à complications, à balancier compensé bimétallique, est dit « à remontoir d’égalité », dispositif ingénieux permettant de surmonter la force motrice variable des horloges à ressort et de palier la variation de puissance d’entraînement de leurs mécanismes. L’ensemble est refermé dans une borne rectangulaire en forme de piédestal en bois d’acajou à réserves moulurées, chapiteau à décrochement souligné de doucine et entablement quadrangulaire et base à pieds rectangulaires ; les quatre faces sont à panneaux vitrés, celle de façade partiellement vitrée.

Excepté son mouvement à complications d’une grande précision et d’une superbe facture, cette pendule présente la particularité d’être enchâssée dans une caisse d’architecture en acajou poli, dont la composition, volontairement dépouillée, est destinée à mettre en valeur l’ingéniosité du mécanisme et la beauté du cadran. Vers la fin du XVIIIe siècle, un ébéniste s’était spécialisé dans la création de ce type de caisses : Ferdinand Schwerdfeger (1734-1818), mentionné « Ferdinand » dans de nombreuses ventes aux enchères du début du XIXe siècle et dont l’atelier, au décès de sa femme en 1803, était décrit comme comprenant quasi-exclusivement des caisses de pendules en acajou. C’est notamment Schwerdfeger qui confectionna la caisse de la pendule géographique qu’Antide Janvier présenta en 1791 au roi Louis XVI et qui appartient de nos jours aux collections du musée national du château de Fontainebleau (illustrée dans M. Hayard, Antide Janvier 1751-1835, Horloger des étoiles, p.1995, p.79) et, c’est de toute évidence, ce même ébéniste, auteur de meubles pour Marie-Antoinette, qui fut chargé de la réalisation de la caisse de la pendule que nous proposons. Ainsi, parmi les modèles connus présentant des boites en acajou réalisé dans le même esprit et souvent rattachées à l’œuvre de l’ébéniste, citons particulièrement : un premier exemplaire conservé au Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon (reproduit dans R. Mühe et Horand M. Vogel, Horloges anciennes, Bibliothèque des Arts, Fribourg, 1978, p.115, fig.152) ; ainsi qu’un second qui appartient aux collections du Centre national des Arts et Métiers à Paris (illustré dans Tardy, La pendule française dans le Monde, Paris, 1994, p.145).

Cronier Jeune

La signature « Cronier jeune élève de Robin » se rencontre uniquement sur des chefs-d’œuvre horlogers. En effet, l’un des seuls autres modèles répertoriés, également signé « Cronier jeune élève de Robin », est une pendule astronomique qui se trouvait anciennement sur le marché de l’art helvétique. Malgré la maîtrise technique exceptionnelle de cet horloger, peu d’informations historiques sont connues. Nous savons notamment qu’il était mentionné sous l’Empire Place des Trois-Maries à Paris (voir J. de la Tynna, Almanach du commerce de Paris, des départements de l’Empire et des principales villes du monde, Paris, XIIe année, 1809, p.198). Il était également probablement lié familialement avec Antoine Cronier (ou Crosnier), l’un des meilleurs horlogers parisiens de la seconde moitié du XVIIIe siècle qui maria sa fille Elizabeth-Emilie, le 13 ventose an VII (vers 1798), avec un horloger parisien du nom d’Antoine-Marie Philibert qui habitait au 50 Place du Pont Michel. Lors de ce mariage, Antoine Cronier avait deux fils brièvement cités, François-Antoine-Louis et Pierre-Joseph, mais certainement trop jeunes pour être en apprentissage dans l’atelier de Robin car ils habitaient toujours chez leurs parents au 140 rue Honoré. Un second horloger actif sous Louis XVI, Jean-Baptiste-François Cronier, certainement apparenté à Antoine Cronier est intéressant ; reçu maître le 27 septembre 1781, il eut un fils qui devint également horloger, Jean-François, installé Quai de la Mégisserie et qui put dans un premier temps signé « Cronier jeune », puis, certainement après que son frère cadet se soit également mis à l’horlogerie, signa « Cronier aîné » pour différencier leurs réalisations respectives (voir Tardy, Dictionnaire des horlogers français, Paris, 1971, p.148).



Dubuisson (1731 - 1815)

Étienne Gobin, dit Dubuisson, est l’un des meilleurs émailleurs parisiens de la fin du XVIIIème siècle et le début du XIXème. Vers le milieu des années 1750 il travaille à la manufacture de Sèvres, établissant par la suite son propre atelier. Il est mentionné dans les années 1790 dans la rue de la Huchette et vers 1812, dans la rue de la Calandre. Spécialisé dans les boîtes de montres et cadrans émaillées, il est réputé pour son habileté exceptionnelle et la représentation de détails.



Ferdinand Schwerdfeger (1734 - 1818)

Ferdinand Schwerdfeger figure parmi les plus importants ébénistes parisiens de la fin du XVIIIe siècle. Après son accession à la maîtrise, en mai 1786, il installe son atelier dans la capitale et connaît immédiatement une grande notoriété. Cependant, son œuvre demeure relativement méconnue ; dû à sa date de maîtrise tardive et au fait que l’artisan estampilla peu. Parmi les quelques meubles qui peuvent lui être attribués avec certitude, mentionnons un ensemble livré pour Marie-Antoinette, ainsi que quelques caisses de régulateurs et de pendules dont les cadrans sont signés par les plus grands horlogers de l’époque, particulièrement Antide Janvier, Jean-Simon Bourdier et Robert Robin (voir M-A Paulin, Schwerdfeger, ébéniste de Marie-Antoinette, in L’Estampille/L’Objet d’art, octobre 2003).