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Thomire

Importante paire de candélabres à neuf lumières, dits « aux prêtresses égyptiennes », en bronze très finement ciselé, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat et marbre noir Paragone

Candelabres_037-07_HD_WEB

Attribuée à Pierre-Philippe Thomire

Les figures d’après un dessin des architectes Charles Percier (1764-1838) et Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853)

Paris, époque Empire, vers 1805-1810

Hauteur130 cm Largeur27 cm Profondeur21 cm

Entièrement réalisé en bronze très finement ciselé, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat, chaque candélabre présente une composition particulièrement élaborée organisée autour d’une superbe figure féminine hiératique représentant une prêtresse égyptienne debout vêtue d’un long pagne en bandeau tombant noué sous la poitrine et gravé de pseudo-hiéroglyphes ; elle porte un collier à perles, rosaces et crosses imbriquées ; elle est coiffée en nattes en étages retenues par une couronne « néret » formée d’un vautour à la tête dressée dont les deux ailes couvrent le sommet de la tête. Les prêtresses tiennent dans leurs mains des palmes ou branchages symboles d’éternité ou de renaissance et supportent sur leurs têtes les bouquets à neuf lumières émergeant de couronnes feuillagées à fleurettes formés de six bras sinueux reliés entre eux par de larges palmes et centrés d’un motif en tige de lotus stylisé terminé d’une pomme à spirales de laquelle s’échappent trois bras de lumières supplémentaires formés de joncs. Elles reposent chacune sur une base rectangulaire agrémentée de motifs en applique à vase canope à couvercle en buste égyptisant flanqué de corbeaux affrontés, elle-même supportée par un socle quadrangulaire mouluré.

Pour contrecarrer les ambitions britanniques en Orient, la France mène, en 1798 et 1801, une expédition en Egypte afin de s’emparer du pays et de dominer politiquement et économiquement la région. Dirigée par le général Bonaparte, puis par ses successeurs, cette opération militaire, mieux connue sous le nom de « Campagne d’Egypte », se double d’une véritable mission de recherche composée d’éminents scientifiques, d’historiens et d’artistes de tout premier plan. De retour en France, les répercussions seront exceptionnelles, particulièrement dans le domaine des arts décoratifs. Dès 1802, le baron Vivant-Denon publie Voyage dans la Basse et la Haute Egypte, ouvrage qui rencontrera un immense succès. Puis ce sont les architectes, les peintres et les artisans qui se mettent à donner leur propre interprétation des modèles égyptiens qu’ils vont décliner et intégrer à leurs propres créations. Dans le domaine particulier du luminaire, de nombreux candélabres s’ornent de figures féminines hiératiques plus ou moins directement inspirées de la sculpture monumentale de l’Egypte des pharaons.

Les candélabres que nous proposons furent réalisés dans ce contexte particulier. Les figures qui jouent le rôle de supports s’inspirent directement d’un dessin préparatoire réalisé vers 1800 par les célèbres architectes de l’Empereur Napoléon, Charles Percier et Pierre-François-Léonard Fontaine (illustré dans H. Ottomeyer et P. Pröschel, Vergoldete Bronzen, Die Bronzearbeiten des Spätbarock und Klassizismus, Band I, Munich, 1986, p.336, fig.5.3.4). Cette aquarelle conservée au Musée du Louvre à Paris servira de modèle d’inspiration pour quelques rares créations parisiennes de la même époque intégrant ces mêmes figures égyptiennes, notamment une console, localisée en 1807 dans le Salon doré de l’hôtel parisien de l’architrésorier Lebrun, qui est conservée au Grand Trianon, dans les jardins du Château de Versailles (reproduite dans P. Arizzoli-Clémentel et J-P. Samoyault, Le mobilier de Versailles, Chefs-d’œuvre du XIXe siècle, Editions Faton, Dijon, 2009, p.95-97).

Concernant plus précisément le modèle des candélabres que nous proposons, il peut être attribué en toute certitude à Pierre-Philippe Thomire qui le déclina dans les toutes premières années du XIXe siècle. En effet, de nos jours, parmi les rares modèles de candélabres similaires connus présentant ces mêmes figures féminines égyptiennes et tous rattachés à l’œuvre de ce bronzier, nous pouvons citer notamment : une paire qui appartient aux chefs-d’œuvre de la collection de Pavlovsk et se trouve dans le Nouveau cabinet de travail au rez-de-chaussée du palais. Ces candélabres ont probablement été fournis au tsar Paul Ier pour le château Saint-Michel de Saint-Pétersbourg par le marchand-mercier Jérome Culot, qui a commandé de nombreux bronzes à Pierre-Philippe Thomire (illustrés dans Le Palais de Pavlovsk, Catalogue complet des collections, Volume X, Métal-Bronze, Édition 2, Candélabres, girandoles, miracles, chandeliers, seconde moitié du XVIIIe – fin du XIXe siècle, Saint-Pétersbourg, GMZ «Pavlovsk», 2016, p.96-99, catalogue 82-83) ; ainsi qu’une deuxième paire livrée par Thomire au Mobilier Impérial, transférée plus tard au château de Saint-Cloud et qui est aujourd’hui dans la collection de la Grande Chancellerie de la Légion d’Honneur, Hôtel de Salm, Paris (J. M. Humbert, et al., Egyptomanie, 1994, p. 286, n° 167) ; enfin, une dernière faisait partie de la collection de Monsieur Hubert de Givenchy dispersée à Monaco en 1993.

Pierre-Philippe Thomire (1757 - 1843)

Pierre-Philippe Thomire est le plus important bronzier parisien du dernier quart du XVIIIe siècle et des premières décennies du siècle suivant. À ses débuts, il travaille pour Pierre Gouthière, ciseleur-fondeur du roi, puis collabore dès le milieu des années 1770 avec Louis Prieur. Il devient ensuite l’un des bronziers attitrés de la manufacture royale de Sèvres, travaillant au décor de bronze de la plupart des grandes créations du temps. Après la Révolution, il rachète le fonds de commerce de Martin-Eloi Lignereux et devient le plus grand pourvoyeur de bronzes d’ameublement pour les châteaux et palais impériaux. Parallèlement, il travaille pour une riche clientèle privée française et étrangère parmi laquelle figure notamment quelques maréchaux de Napoléon. Enfin, il se retire des affaires en 1823.