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Thomire
Pierre-Philippe Thomire (1757-1843)

Importante paire de grands candélabres néoclassiques à sept lumières dits « aux prêtresses » en bronze très finement ciselé, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat ou à l’or bruni

Candelabres026-04_HD_WEB

Attribuée à Pierre-Philippe Thomire

Paris, époque Empire, vers 1805-1810

Hauteur129.5 cm Largeur32 cm Profondeur30 cm

Provenance :

– Offerte en 1970 en cadeau de mariage, avec une seconde paire de candélabres similaires, par Charles de Beistegui (1895-1970) à Juan Guillermo de Beistegui (1930-2017) et Annick de Rohan-Chabot.

– Hôtel de Monsieur et Madame Juan Guillermo de Beistegui, rue de Varenne à Paris.

 

Entièrement réalisé en bronze très finement ciselé, patiné « à l’antique » et doré à l’or mat ou à l’or bruni, chaque candélabre se présente sous la forme d’un fût anthropomorphe représentant une superbe prêtresse de posture hiératique vêtue d’un longue tunique brodée à jeux de zig-zags ; elles tiennent chacune dans leurs mains, par-devant elles, une lampe à huile, la panse en navette aplatie surmontée de deux victoires ailées adossées au couvercle simulé à prise en gland, présentant des corps en partie basse en feuilles de refend et tendant les mains vers un double fleuron ponctué de rosaces sur lequel est perchée une colombe ; les déversoirs prennent la forme de têtes fantastiques aux gueules largement ouvertes et les piédouches à bagues godronnées reposent sur des bases circulaires ceinturées de frises de palmettes stylisées soulignées de perles en enfilage. Chaque prêtresse supporte un chapiteau ionique, à volutes et godrons, sur lequel repose une coupe couverte à larges palmettes repercées d’où s’échappe le bouquet de lumières à fût renflé « en léger balustre », terminé en binet et bobèche à triple motif de petites corniches détachées en promontoires à enroulements supportant des papillons, sur lequel se rattachent six autres bras de lumière sinueux, disposés sur deux étages et richement agrémentés de rinceaux, mascarons, frises godronnées et aiguières à prises détachées en mufle de lion ou bassins, binets et bobèches à palmettes, feuillages, grecques et fleurons. Les figures féminines reposent sur une haute base triangulaire à côtés évidés à riche décor de frises d’oves et de raies de cœur, angles à têtes de Diane ou chutes de perles enfilées et motifs en appliques à décor, en façade, des chars de Vénus ou de Mercure tirés par des cygnes ou des coqs surmontant des oculi dans lesquels se détachent des hiboux aux ailes déployées dans un environnement étoilé, et sur les côtés, de motifs « en arabesques » à jeux de fleurons, acanthes ou palmettes centrés de boucs supportés par des thyrses. Aux angles des bases, sont des chevaux marins ailés aux queues finement tracées d’écailles ; enfin, l’ensemble repose sur un contre-socle triangulaire à pans coupés et côtés légèrement rentrants.

Pour contrecarrer les ambitions britanniques en Orient, la France mène, en 1798 et 1801, une expédition en Egypte afin de s’emparer du pays et de dominer politiquement et économiquement la région. Dirigée par le général Bonaparte, puis par ses successeurs, cette opération militaire, mieux connue sous le nom de « Campagne d’Egypte », se double d’une véritable mission de recherche composée d’éminents scientifiques, d’historiens et d’artistes de tout premier plan. De retour en France, les répercussions seront exceptionnelles, particulièrement dans le domaine des arts décoratifs. Dès 1802, le baron Vivant-Denon publie Voyage dans la Basse et la Haute Egypte, ouvrage qui rencontrera un immense succès. Puis ce sont les architectes, les peintres et les artisans qui se mettent à donner leur propre interprétation des modèles égyptiens qu’ils vont décliner et intégrer à leurs propres créations. Dans le domaine particulier du luminaire, de nombreux candélabres s’ornent de figures féminines hiératiques plus ou moins directement inspirées de la sculpture monumentale de l’Egypte des pharaons. La paire de candélabres que nous proposons fut réalisée dans ce contexte particulier. L’originalité de sa composition, ainsi que la qualité de sa ciselure et de sa dorure, nous permettent de l’attribuer à Pierre-Philippe Thomire, le plus talentueux bronzier parisien des premières décennies du XIXe siècle. De nos jours, parmi les rares modèles de candélabres connus de dessin identique avec parfois certaines variantes dans le décor, nous pouvons citer particulièrement : une première paire également proposée par « La Pendulerie » et ayant la même provenance ; ainsi qu’une deuxième entièrement en bronze doré qui est illustrée dans G. et R. Wannenes, Les bronzes ornementaux et les objets montés de Louis XIV à Napoléon III, Milan, 2004, p.387 ; enfin, mentionnons une dernière paire, anciennement dans la collection Mancel, qui est reproduite dans S. Chadenet, Les styles Empire & Restauration, Editions Baschet et Cie, Paris, p.25.

 

Les Beistegui : Une dynastie de grands collectionneurs

Héritiers d’une puissante famille ayant fait fortune dans l’exploitation de mines d’argent au Mexique, les Beistegui viennent s’installer en France dans le dernier quart du XIXe siècle après la chute de l’empereur Maximilien. Le petit-fils du fondateur, Carlos de Beistegui (1863-1953), s’intéresse précocement à l’Art en général et aux arts décoratifs français en particulier. Amateur insatiable, il constitue en l’espace de quelques décennies d’importantes collections d’œuvres d’art, dont un ensemble de portraits du XVIIIe siècle qui est donné, sous réserve d’usufruit, au Musée du Louvre et qui figure de nos jours dans une salle éponyme de ce musée. Son neveu, Charles de Beistegui (1895-1970), suit la voie de son oncle et se rend célèbre notamment par l’acquisition, la décoration et le réaménagement complet du château de Groussay à Montfort-l’Amaury, chef-d’œuvre issu de sa rencontre avec le décorateur Emilio Terry, ainsi que par l’organisation en septembre 1951 du « Bal du siècle » au Palais Labia à Venise, sa résidence italienne. Quelques années plus tard, en 1970, Charles offrira deux paires de candélabres, dont celle que nous proposons, à son neveu, Juan Guillermo de Beistegui, lors du mariage de ce dernier avec Annick de Rohan-Chabot. A l’instar de son oncle et de son grand-oncle, Juan Guillermo de Beistegui se distingue rapidement par un engouement marqué pour les arts décoratifs français des XVIIIe et XIXe siècles. Fils de Juan Francisco de Beistegui e Yturbe et de Carmen de Landa y Osio, la fille du gouverneur de Mexico, Juan Guillermo et son épouse meublent somptueusement leur hôtel parisien de la rue de Varenne, ancienne résidence du Maréchal Lannes, en sélectionnant avec discernement des meubles, sièges, sculptures, objets d’art et bronzes d’ameublement du XVIIIe siècle et de la période napoléonienne.

Pierre-Philippe Thomire (1757 - 1843)

Pierre-Philippe Thomire est le plus important bronzier parisien du dernier quart du XVIIIe siècle et des premières décennies du siècle suivant. À ses débuts, il travaille pour Pierre Gouthière, ciseleur-fondeur du roi, puis collabore dès le milieu des années 1770 avec Louis Prieur. Il devient ensuite l’un des bronziers attitrés de la manufacture royale de Sèvres, travaillant au décor de bronze de la plupart des grandes créations du temps. Après la Révolution, il rachète le fonds de commerce de Martin-Eloi Lignereux et devient le plus grand pourvoyeur de bronzes d’ameublement pour les châteaux et palais impériaux. Parallèlement, il travaille pour une riche clientèle privée française et étrangère parmi laquelle figure notamment quelques maréchaux de Napoléon. Enfin, il se retire des affaires en 1823.